Le vécu de l’arrêt maladie sur le long terme

Beaucoup de personnes vivent difficilement leur arrêt maladie. Certains le refusent d’abord et repoussent toujours plus leurs limites. Le risque est d’aller vers un épuisement physique ou psychologique important qui nécessitera ensuite un arrêt beaucoup plus long pour récupérer. Le corps exprime, crie son besoin de s’arrêter, quand l’esprit ne l’écoute pas.
Les causes de l’arrêt maladie sont diverses.
Origine :

  • Souffrance au travail
  • Problématique psychologique personnelle due à un évènement de vie (deuil, séparation)
  • Somatique

L’arrêt maladie est une mesure thérapeutique visant la prévention des complications, une aide à la guérison et la prévention d’un risque infectieux. L’arrêt de travail est souvent nécessaire pour reprendre de l’énergie, se reposer, se soigner.
L’arrêt maladie est toutefois un moment parfois difficile à vivre pour le salarié, surtout lorsqu’il se prolonge dans le temps. Il risque de générer des sentiments tels que la culpabilité, la honte, le sentiment d’inutilité.
Ces ressentis peuvent provoquer une perte de confiance en ses compétences, un isolement social, ou l’entrée dans un état dépressif.

D’où vient ce sentiment de culpabilité ?

La culpabilité est une émotion. Elle renvoi à quelqu’un qui est coupable d’une infraction. Elle se définit aussi comme « le sentiment de faute ressenti par un sujet que celle-ci soit réelle ou imaginaire ». La culpabilité permet de rappeler les lois humaines. Elle est subjective selon les personnes, leurs cultures, leur société, leurs règles morales. Les valeurs, les croyances vont parfois à l’encontre du bon sens qui est de préserver d’abord la santé de la personne.
Des pensées automatiques peuvent envahir la personne et l’empêcher d’avancer, tels que : « je suis en arrêt, c’est un signe de faiblesse », « je laisse tomber les collègues », « on va me remplacer, je vais perdre mon poste », « j’ai trop de responsabilités ou de tâches à effectuer, je ne peux pas me permettre de m’arrêter ».

Comment dépasser le sentiment de culpabilité ?

  • Se dire que l’arrêt de travail ne correspond pas à des vacances
  • Prendre conscience de ne pas être coupable de son arrêt et s’autoriser à s’arrêter « je ne suis pas coupable de cet arrêt ». Il est possible de l’écrire, le dire à voix haute
  • Ne pas avoir des idées fausses comme quoi il faut gérer l’organisation de son travail. L’organisation du travail incombe au responsable, ce ne doit pas être une source d’inquiétude.
  • Garder le lien avec l’entreprise : Il est important de ne pas perdre de vue la perspective du retour en se tenant informer au cours de l’arrêt des changements, de l’évolution de l’entreprise (sauf si son environnement de travail était néfaste). Il est judicieux d’instaurer une routine : un appel avec un collègue ou son responsable une fois par mois par exemple.
  • Se protéger et s’éloigner des personnes qui amènes des idées négatives vis-à-vis de l’arrêt et conduisent à culpabiliser
  • enfin, accepter de s’occuper de soi. Ne pas s’imposer d’objectifs mais vivre au jour le jour et réaliser des activités qu’on apprécie, qu’on avait peut-être plus le temps de faire avant.

D’où vient le risque de perte de confiance ?

Vivre une longue période sans mettre en pratique ses compétences peut générer un doute sur sa capacité à retourner sur son poste de travail. La maladie, qui touche la personne dans son corps, peut empêcher de réaliser des activités du quotidien. L’individu se retrouve en situation de dépendance, ce qui est parfois difficile à accepter. Il risque d’avoir le sentiment de subir la situation.

L’accompagnement psychologique

Un accompagnement thérapeutique auprès d’un professionnel va permettre à la personne de prendre conscience des mécanismes qui l’habitent, que l’arrêt provienne d’une souffrance psychologique ou d’une problématique physique. Il sera aussi l’occasion de trouver des solutions pour mieux accepter ce temps.

Comment anticiper la reprise ?

Le retour au travail après plusieurs mois d’arrêt provoque une anxiété d’anticipation : doute sur ses compétences, retour des contraintes horaires, retour des objectifs et sentiments de devoir faire ses preuves, questions des collègues sur l’absence, etc.
Quelques conseils
-dresser la liste de ses ressources, de ses savoirs faires et qualités
-se rappeler les expériences positives vécues
-demander une visite de pré-reprise

La visite de préreprise est effectuée par le médecin du travail pendant l’arrêt de travail. Le but est d’aider le salarié à reprendre son emploi dans de bonnes conditions. A l’issue, le médecin peut émettre des préconisations

  • Aménager le temps de travail
  • Adapter le poste de travail
  • Envisager une reconversion professionnelle

La visite de préreprise se fait à la demande du salarié ou du médecin traitant. Elle ne remplace pas la visite de reprise. En effet, « Après un arrêt d’au moins trente jours, la reprise du travail est obligatoirement assortie d’une visite de reprise » (art. R. 4624-22 du Code du travail). Cette visite doit se tenir dans les huit jours suivant le retour du salarié.

Le médecin traitant peut prescrire un temps partiel thérapeutique (art. L. 323-3, L. 433-1, R. 433-15 du Code de la Sécurité sociale). Il correspond à un aménagement temporaire de la durée du travail, permettant de reprendre progressivement l’activité professionnelle.

Ces aménagements sont importants pour rassurer le salarié sur sa reprise et lui assurer un retour dans des conditions qui préserveront sa santé.

Références :

Retour au travail après un cancer, Fondation Arc. Edition 2014.
https://www.ameli.fr/entreprise/vos-salaries/retour-emploi/visite-pre-reprise
https://www.juritravail.com
Psychopathologie du travail, Dejours, C & Gernet, I. 2016.
La santé psychique au travail, Faurie, I Almudever, B.2020.

 

Auteur : Lisa Guicheteau, Psychologue clinicienne